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Photo du rédacteurMarie-Ève Touzin

Vivre en accord avec nos valeurs

Chacun de nous avons des valeurs qui guident nos actions et nos choix. Et chaque personne étant unique de par sa personnalité et son vécu, il peut arriver que nos proches aient certaines valeurs un peu divergentes des nôtres. Cela peut mener à des situations où les différentes valeurs – et donc, où les différentes personnes - entrent en conflit. Quand on interagit avec un proche atteint de maladie mentale, il peut parfois y avoir une discorde entre le chemin qu'on voit pour lui, et la voie que lui-même choisit de se tracer.

 

Les problèmes qui peuvent apparaître lorsque des valeurs différentes se confrontent sont alors les suivants :

 

  • on essaie d'imposer à l'autre les décisions qui découlent de nos propres croyances et priorités ;

  • on se sent forcé, dans certaines circonstances, de poser des actions qui ne nous ressemblent pas ;

  • ou alors, on en vient à tolérer des comportements qu'on ne se sent pas bien de tolérer, qui sont en désaccord avec nous-même.

 

Voyons ces aspects de manière plus détaillée.

 

Décider pour d’autre

 

Les choix qu'on voudrait parfois faire pour notre proche atteint, on veut évidemment les faire parce qu'on veut son bien. Cependant, on peut aussi comprendre que celui-ci tienne à prendre lui-même ses propres décisions, qui seront parfois bonnes, et parfois moins. Il peut arriver que les choix faits par notre proche, ou les actions qu’il pose, mènent à des conséquences négatives plus ou moins réfléchies, surtout s’il se trouve dans un état où sa perception des choses est perturbée par la maladie.

 

Dans le cas où une personne est dans une situation où sa santé mentale est affectée et qu’un membre de son entourage doit prendre des décisions pour elle, on se retrouve face à deux réalités : celle de la personne atteinte qui souffre des effets directs de la maladie, et celle de la personne qui assiste à la souffrance d’un être aimé. Chacune de ces réalités amène son lot d’inquiétudes, d’émotions difficiles et de besoins, qui doivent être pris en compte chacun à leur manière.

 

Notre regard extérieur a ses avantages et ses inconvénients : n'étant pas nous-même la personne atteinte, nous avons un certain recul, peut-être une meilleure vue d'ensemble de la situation. Notre jugement est moins altéré par la maladie et les émotions intenses et instables qu’elle peut engendrer. On voit peut-être les choses un peu plus clairement que l’autre. En même temps, n'étant pas nous-même dans la peau de notre proche qui souffre, on ne peut pas percevoir toutes les subtilités et les détails de ce qu'il ressent, de ses besoins, de ses peurs, de ses limites. La souffrance ne découle pas seulement de la maladie en tant que telle; ce que l’autre ressent est aussi teinté par sa personnalité, sa sensibilité, et par les expériences qu’il a vécues dans le passé, et qu’on ne connaît pas toujours pleinement. Cela peut faire en sorte que, malgré toute notre bonne volonté, on reste quand même avec un certain angle mort, et qu’on n'ait pas toujours toutes les informations nécessaires pour comprendre ou aider l'autre au mieux.

 

Si l’on est dans une situation où l’on veut faire un choix pour l’autre, un choix qui amène un désaccord entre nous deux, il est essentiel de se poser quelques questions : « Est-ce que je prends cette décision pour mon proche parce que c’est un choix important de sécurité (la sienne ou encore celle d’autrui)? Ou est-ce que je veux décider pour lui parce que les méthodes qu’il utilise et ses priorités sont différentes des miennes, et que je trouverais préférable qu’on fasse les choses à ma façon? ». Il y a des moments où il est effectivement important de prendre une décision pour notre proche, même contre son gré, si sa sécurité ou la vôtre est en danger; par contre, il y a d’autres moments où l’on préférerait que l’autre adopte un certain rythme, ou une certaine habitude – qui, certes, pourraient peut-être l’aider – mais qui ne sont pas les seules options possibles pour aller mieux. Plusieurs solutions peuvent être aidantes, même si évidemment, toutes ne sont pas d’efficacité ou de rapidité égales. Parfois, votre proche n’est tout simplement pas en mesure d’adopter un certain rythme, ou n’est pas intéressé par votre solution à vous, et il faut être prêt à l’écouter et à essayer de comprendre comment lui voit la suite des choses. Si vous tentez sincèrement de prendre en considération son point de vue, il aura aussi plus de chance d’avoir de l’ouverture à entendre le vôtre.

 

On doit également prendre en compte que si, par exemple, l’exercice physique et la famille sont des valeurs prioritaires pour vous, celles-ci ne seront peut-être pas tout en haut de la liste des valeurs de votre proche. L’objectif que vous souhaitez le voir atteindre dans son rétablissement serait peut-être qu’il réussisse à sortir prendre une marche à tous les jours et qu’il participe plus activement aux rencontres familiales, alors que pour lui, sa priorité serait peut-être plutôt d’arriver à gérer son stress ou reprendre contact avec ses amis. Toutes ces choses sont importantes, mais il faut rester réaliste par rapport à ce que votre proche est capable de faire pour le moment, ainsi que ce qui lui tient le plus à cœur par rapport à son rétablissement. Demandez-lui ce qui compte le plus pour lui, ce qu’il aimerait pouvoir faire en allant mieux. Vous pouvez aussi lui faire des propositions de choses à faire (sans le forcer), et lui parler calmement de vos préoccupations, en lui laissant savoir que votre but n’est pas de le pousser à faire des choses qu’il ne veut pas faire, mais que vous souhaitez simplement qu’il puisse aller mieux.

 

Poser des actions difficiles / agir à contre-cœur

 

Vivre avec une personne atteinte, ça signifie de vivre parfois certains moments plus difficiles, qui peuvent nous pousser à prendre des décisions qu’on aurait préféré ne pas avoir à prendre. On fait certains choix, certains sacrifices, qui ne sont pas en accord avec ce qu’on aurait voulu idéalement dans la situation ou dans la relation. Par exemple, on peut en venir à décider de s’éloigner de la personne à qui on tient, même à contre-cœur, parce que ses comportements ou attitudes devenaient trop blessants ou trop difficiles à gérer pour nous. Ou, un peu à l’opposé, on peut se sentir obligé d’être continuellement présent pour notre proche, parce qu’on se sent responsable de son mieux-être, alors qu’on aurait préféré pouvoir prendre plus de temps pour nous-même. Il arrive aussi des cas où l’on doit prendre la décision souvent difficile de contacter les services d’urgence, parce que la situation n’est plus sécuritaire pour l’une ou l’autre des parties.

 

Personne n’aime avoir à faire des choix par sentiment d’obligation, et dans un monde idéal, on ne devrait pas avoir à le faire non plus. Faire des choix qu’on se sent mitigé de faire, ça vient souvent nous chercher (et parfois nous embrouiller) dans nos valeurs. On peut avoir l’impression que les valeurs importantes pour nous comme l’empathie, la loyauté ou la tolérance, qu’on a l’habitude de démontrer à la personne qu’on aime, doivent maintenant faire face à d’autres valeurs comme le respect de soi, la sécurité et le lâcher-prise, qui viennent mettre des limites à la situation parfois inacceptable vécue.

 

C’est déchirant quand des valeurs différentes s’affrontent en nous. On ressent alors l’incertitude et la culpabilité qui émergent. On peut avoir la sensation qu’un choix difficile qu’on ferait, même à contre-cœur, redéfinirait de manière négative la façon dont on se perçoit. Mais le triste fait est que malgré nos qualités et toute notre bonne volonté, des situations d’urgence appellent parfois à des mesures d’urgence. Il faut parfois secouer un peu le présent pour pouvoir améliorer l’avenir. Et peu importe la décision qu’on prend, on peut essayer de focuser sur le positif en se demandant en quoi ce choix est en accord avec au moins une valeur importante pour nous (que ce soit le repos, la résilience, l’expression de soi ou toute autre).

 

Chaque situation est différente, porte ses propres enjeux et conflits de valeurs. Certains priorisent constamment les besoins de l’autre, en se sentant épuisés et frustrés parce qu’ils négligent leurs propres besoins. D’autres s’éloignent de la situation, et se sentent coupables parce que s’occuper de l’autre est important pour eux. Trouver un équilibre entre le surinvestissement et le détachement peut être délicat pour plusieurs familles, et une ressource comme le Portail peut les aider à trouver un équilibre en ce sens.

 

Tolérer ce qu’on ne devrait pas

 

Pour plusieurs, la ligne qui sépare ce qu’on doit tolérer ou non d’un être aimé est un peu floue. Il est facile de trouver des excuses à l’autre, surtout si c’est quelqu’un à qui on tient, et encore plus si on sait que cette personne vit des difficultés. On peut alors en venir à supporter certains gestes ou des attitudes moins correctes, tout en ressentant un malaise de le faire. Même si en temps normal on ne voudrait pas tolérer cela, on sent ici qu’on n’a pas d’autres choix. On a peur des réactions de l’autre, ou bien on essaie de le ménager parce qu’on sait qu’il souffre. On peut alors se sentir frustré, blessé, coupable, et avoir l’impression que la personne en face de nous ne nous respecte pas ou ne se soucie pas de ce qu’on ressent. L’accumulation fréquente de ces émotions peut finir par mener à du ressentiment du membre de l’entourage envers son proche atteint, et nuire à la relation.

 

Quand on vit une situation qui n’est pas en accord avec nos valeurs, on ressent une sorte de dissonance, un sentiment désagréable d’incompatibilité entre ce qui se passe autour de nous et ce qu’on est à l’intérieur. Il faut voir ce sentiment comme étant une sonnette d’alarme, et l’utiliser comme élan pour faire une action vers quelque chose qui nous semble plus juste, plus en accord avec nous-même.

 

Cette action, ça peut être de poser des limites… ce qui est parfois plus facile à dire qu’à faire, pour plusieurs raisons. On peut se sentir coupable à l’idée de poser des limites à notre proche, on peut aussi ne pas savoir comment faire, ne pas être vraiment certain de ce qui est réaliste comme attente, ou de ce qui est acceptable de tolérer ou pas. Et si les limites qu’on a établies ne sont pas respectées, on fait quoi? Est-ce qu’on sera capable de définir ou même d’appliquer une conséquence? Toutes ces interrogations, les intervenants du Portail peuvent vous aider à y trouver des réponses, et à y voir plus clair dans votre situation et dans vos attentes.


Vous avez toujours le droit de mettre vos limites, en accord avec ce que vous vous sentez à l’aise de tolérer ou non. La manière de présenter ces limites importe aussi. Essayer de rester calme et respectueux. Donnez des explications claires, avec des conséquences claires. Le but n’est pas que l’autre personne se sente moins aimée ou abandonnée dans son état. Au contraire, votre proche devrait savoir qu’en tout temps, il y a des ressources disponibles pour l’aider – mais que cette ressource, ça ne peut pas seulement être vous.


En conclusion

 

Si plusieurs choses sont susceptibles de nous diviser, on peut quand même tenter de trouver ce qui nous rassemble. Partagez votre point de vue à votre proche, et accueillez le sien. Tentez de trouver sur quoi vous êtes d’accord, que ce soit un objectif souhaité, ou une action plus concrète pour y arriver. Explorez les différentes solutions possibles, en gardant en tête ce qui est réaliste pour votre proche, et ce qui l’intéresse comme prochain pas à faire. Après tout, on est toujours plus coopératif quand on sent qu’on a eu notre mot à dire dans le choix qui a été fait.

 

Essayez de trouver autant que possible un équilibre entre vos besoins et les siens. Vous avez toujours le droit de demander de l’aide pour vous-même, et de rediriger votre proche vers une tierce personne qui pourra aussi l’aider (à la fois pour lui offrir une ressource supplémentaire, et aussi pour enlever un peu de responsabilités de sur vos épaules).

 

Bref, vivre en accord avec nos valeurs, c’est trouver un équilibre entre soi et l’autre.




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